Tribunal fédéral
Procédure classée à juste titre
Selon le TF, c’est à juste titre que le Ministère public du canton de Soleure a classé la procédure pénale dirigée contre un père, notamment accusé d’avoir commis de graves délits sexuels sur sa fille, alors âgée de 7 ans. Le TF rejette le recours de la mère de l’enfant. La Cour suprême soleuroise, se fondant sur les preuves recueillies de manière approfondie ainsi que sur une expertise de crédibilité des déclarations de l’enfant, était en droit de considérer qu’il s’agissait d’un cas clair justifiant le classement de la procédure.
(7B_28/2023 du 24.10.2023)
L’entrepreneur doit établir des factures détaillées
Lorsque le prix de l’ouvrage n’a pas été fixé à l’avance, ou s’il ne l’a été qu’approximativement, il doit être déterminé d’après la valeur du travail et les dépenses de l’entrepreneur (art. 374 CO). La rémunération de l’entrepreneur correspond aux dépenses objectivement nécessaires pour un travail soigné. Les dépenses invoquées doivent être présentées de manière que leur nécessité et leur adéquation puissent être vérifiées. Il ne suffit pas de dresser des tableaux indiquant quels collaborateurs ont travaillé à quelle date et pendant combien d’heures.
Des indications inexistantes ou se limitant à des mots-clés ou à des descriptions vagues et incompréhensibles sont insuffisantes. L’entrepreneur doit démontrer quelles prestations ont été fournies par les sous-traitants concernés, qu’elles étaient nécessaires, et que les prix étaient adéquats.
(4A_226/2023 du 10.10.2023)
Frais de simple consultation du dossier
Selon l’art. 102 al. 3 CPP, toute personne autorisée à consulter le dossier peut en demander une copie contre le versement d’un émolument. Cette disposition ne précise toutefois pas si des frais peuvent également être perçus pour une simple consultation du dossier. Le TF laisse la question ouverte. Dans une procédure pénale pour délit routier, il admet toutefois un recours contre un jugement du Tribunal cantonal zurichois admettant la perception d’émoluments d’un montant de 570 francs pour la consultation du dossier auprès de l’Institut médico-légal zurichois.
Selon le TF, il ne ressort pas de la décision attaquée sur quelle base juridique les frais de consultation du dossier peuvent être mis à la charge de la recourante, ni selon quels principes le montant d’un tel émolument devrait être déterminé. L’indication qu’il s’agit de frais pour «l’organisation de la consultation du dossier» ne suffit pas.
(7B_49/2023 du 3.11.2023)
Acquittement d’un procureur
Le TF acquitte l’ancien procureur en chef du canton d’Appenzell Rhodes-Intérieures, initialement condamné pour entrave à l’action pénale compte tenu de sa passivité dans la conduite d’une procédure pour homicide par négligence. Dans cette affaire, six ans et neuf mois s’étaient écoulés depuis l’accident mortel de l’apprenti d’un garage automobile en septembre 2010 avant que le procureur mette en accusation des responsables de l’entreprise formatrice.
En octobre 2017, le tribunal a classé la procédure pour cause de prescription. Le TF constate que la surcharge de travail était alors élevée, et que le procureur pouvait légitimement espérer que la procédure serait menée à terme en temps voulu compte tenu des circonstances.
(6B_230/2022 du 25.10.2023)
Une notification au voisin sans effet
L’Office argovien des migrations a adressé sa décision concernant un permis d’établissement au destinataire en courrier postal A Plus. Selon la confirmation de La Poste, l’envoi a été remis le 3 août 2022. Le 5 septembre 2022, le destinataire a posté un recours contre cette décision. Considérant que le délai de recours a été dépassé, le tribunal administratif a refusé d’entrer en matière.
L’homme a toutefois fait valoir que le facteur avait remis par erreur le courrier à son voisin, qui porte le même nom de famille que lui. Le voisin lui aurait ensuite remis la lettre le 5 août. Le TF admet le recours du destinataire, en considérant qu’il n’est pas acceptable que l’autorité lui fasse supporter le risque d’une erreur de notification.
(2C_988/2022 du 7.11.2023)
L’assurance obligatoire ne couvre que les cicatrices défigurantes
La correction chirurgicale de cicatrices hypertrophiques sur le bras et à côté du sternum d’un jeune homme de 23 ans n’est pas prise en charge par l’assurance-maladie, car ces cicatrices ne provoquent pas de douleurs importantes, ne limitent pas considérablement la mobilité et n’ont pas d’influence négative sur la vie professionnelle. Même si, d’un point de vue esthétique, elles peuvent porter atteinte à l’apparence et provoquer un sentiment de honte lorsque le torse est nu, elles ne peuvent pas être qualifiées de «défigurantes». Elles peuvent être facilement dissimulées par des vêtements appropriés.
(9C_222/2023 du 18.12.2023)
Tribunal administratif fédéral
L’EPFL doit reconnaître Zofingue
En août 2020, dans le cadre de sa mission de promotion de l’égalité des sexes, l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) a refusé d’accorder le statut d’association d’étudiants à Zofingue, une société étudiante où seuls les hommes sont autorisés. À tort selon le TAF. Si l’égalité des sexes constitue certes un fondement de la Constitution fédérale, la liberté d’association est aussi un droit fondamental. La décision de l’EPFL, qui dispose de moyens moins invasifs pour promouvoir l’égalité des sexes, n’est pas proportionnelle.
En outre, Zofingue, qui ne concerne qu’une quarantaine d’étudiants, n’a que peu d’impact sur l’ensemble du corps estudiantin féminin. Par ailleurs, sa non-reconnaissance pourrait ouvrir la voie à des contestations portant sur l’existence d’associations féminines sur le site universitaire. L’arrêt est susceptible de recours au Tribunal fédéral.
(B-3985/2021 du 7.12.2023)
Droit d’asile des Afghanes
Le TAF accepte le recours de deux Afghanes contre leur expulsion, et considère que l’asile doit leur être accordé en Suisse. Le jugement soutient la nouvelle pratique du Secrétariat d’État aux migrations en matière d’asile. Selon le TAF, une vie autodéterminée pour les femmes et les filles en Afghanistan n’est pas possible sous le régime actuel. Célibataires, elles seraient soumises au risque de mariage forcé, et n’auraient pas la possibilité de suivre une formation ou d’exercer une profession. Le retour en Afghanistan serait lié à une pression psychique considérable, et les empêcherait de vivre dans la dignité.
(D-4386/2022, D-4390/2022 du 22.11.2023)