Droit des étrangers
Violentée puis renvoyée!
Le renouvellement d’une autorisation de séjour a été refusé à une femme victime de violences de la part de son mari et séparée de celui-ci. Irrecevabilité de ses deux recours.
Résumé des faits:
X., Ethiopienne, est en Suisse depuis 2000. Elle est mariée avec Y., Guinéen titulaire d'une autorisation d'établissement. A la suite de violences de la part de son époux, X. s'est constitué un domicile séparé à partir du 1er janvier 2005. En mai 2005, le Service de la population du canton de Vaud a refusé de renouveler l'autorisation de séjour de X. En août 2006, le Tribunal administratif (TA) vaudois a rejeté le recours de X.
X. a déposé simultanément un recours de droit administratif (RDA) et un recours de droit public (RDP) au Tribunal fédéral. Dans son RDP, elle conclut à l’annulation de l’arrêt du TA, l’autorité compétente étant invitée à renouveler son autorisation de séjour. Elle invoque l’art. 8 CEDH et fait valoir l’arbitraire de l’arrêt attaqué ainsi que la violation de ses droits de partie équivalant à un déni de justice formel. Dans son RDA, elle conclut à ce que l’arrêt attaqué soit réformé et son autorisation de séjour renouvelée; subsidiairement, elle demande l’annulation de l’arrêt attaqué, le Service cantonal étant invité à rendre une nouvelle décision dans le sens des considérants. Elle reproche pour l’essentiel à l’autorité intimée d’avoir mal constaté et apprécié les faits déterminants.
Extrait des considérants en droit:
2. En vertu de l’art. 100 al. 1 let. b ch. 3 OJ, le recours de droit administratif est irrecevable contre l’octroi ou le refus d’autorisations auxquelles le droit fédéral ne confère pas un droit. Les autorités compétentes statuent librement, dans le cadre des prescriptions légales et des traités avec l’étranger, sur l’octroi ou le refus de l’autorisation de séjour ou d’établissement (art. 4 LSEE). En principe, l’étranger n’a pas de droit à l’octroi ou à la prolongation d’une autorisation de séjour. Le recours de droit administratif n’est donc pas recevable, à moins que ne puisse être invoquée une disposition particulière du droit fédéral ou d’un traité accordant le droit à la délivrance d’une telle autorisation (ATF 131 II 339 consid. 1 p. 342/343).
2.1 L’art. 17 al. 2 1re phrase LSEE dispose que si l’étranger possède l’autorisation d’établissement, son conjoint a droit à l’autorisation de séjour aussi longtemps que les époux vivent ensemble. Une séparation entraîne la déchéance de ce droit, indépendamment de ses motifs, à moins qu’elle ne soit que de très courte durée et qu’une reprise de la vie commune ne soit sérieusement envisagée à brève échéance (ATF 130 II 113 consid. 4.1 p. 116 confirmé récem-ment dans l’arrêt 2P.51/2006 du 20 mars 2006 consid. 3.1). Il est également sans importance qu’aucune procédure de divorce n’ait été introduite ou qu’elle ne soit pas terminée (arrêt 2A.171/1998 du 1er avril 1998 consid. 2b et les références).
Dans le cas particulier, il n’est pas contesté que la recourante est mariée avec un étranger titulaire d’une autorisation d’établissement, de vingt-sept ans son aîné, et qu’elle vit séparée de son époux depuis le 1er janvier 2005, soit depuis deux ans. Elle a par ailleurs déposé une requête de mesures protectrices de l’union conjugale (le 24 décembre 2004), après que son époux, sous l’emprise de l’alcool, l’ait chassée de la maison et menacée avec un couteau. La recourante se dit toutefois prête à reprendre la vie commune avec son époux; elle aurait eu quelques contacts avec lui et ils auraient discuté de leur avenir proche. Or, malgré ces affirmations, aucun élément concret n’indique qu’une telle reprise serait envisageable de part et d’autre à brève échéance. Dans son mémoire de recours, l’intéressée fait au contraire remarquer qu’«elle a tout fait pour sauver son union sans que ses efforts ne trouvent d’écho auprès de son mari. Il la laisse dans une situation d’incertitude sur une éventuelle reprise de la vie commune».
Dans ces conditions, vu que la séparation des époux X.Y. ne peut être qualifiée de temporaire et en l’absence d’indices d’une réelle possibilité de reprise de la vie commune, le recours de droit administratif est irrecevable sous l’angle de l’art. 17 al. 2 LSEE.
2.2 La recourante se réclame aussi de l’art. 8 CEDH qui garantit le droit au respect de la vie privée et familiale. Encore faut-il, pour pouvoir invoquer cette disposition, que la relation entre l’étranger et un membre de sa famille ayant le droit de présence en Suisse soit étroite et effective (ATF 131 II 265 consid. 5 p. 269; 129 II 193 consid. 5.3.1 p. 211). L’existence de tels liens ne pouvant pas être admise au vu des circonstances (cf. consid. 2.1 ci-dessus), le recours de droit administratif n’est pas non plus recevable sous l’angle de cette disposition.
3.1 Faute de droit à l’autorisation de séjour, soit d’intérêt juridiquement protégé au sens de l’art. 88 OJ, le recours de droit public est irrecevable (ATF 122 I 267 consid. 1a p. 269/270 et la jurisprudence citée). La recourante peut toutefois se plaindre de la violation de ses droits de partie équivalant à un déni de justice formel. Il ne lui est cependant pas permis de mettre en cause, même de façon indirecte, la décision sur le fond; le recours ne peut donc pas porter sur des points indissociables de cette dernière (ATF 129 I 217 consid. 1.4 p. 222; 122 I 267 consid. 1b p. 270; 120 Ia 227 consid. 1 p. 229/230 et les arrêts cités).
3.2 Dans la mesure où la recourante dénonce une appréciation prétendument arbitraire des preuves, son recours de droit public est néanmoins irrecevable, étant donné que l’examen de telles questions ne peut pas être séparé de l’examen du fond lui-même (ATF 126 I 81 consid. 7b p. 94). En outre, elle ne fait valoir que des griefs de fond à l’encontre de la décision attaquée, même si ces moyens sont énoncés inexactement comme violation du droit d’être entendue.
Arrêt du TF du 16 février 2007 (2P.246/2006 et 2A.580/2006)
Sida
Refus de prolonger l’autorisation de séjour à l’égard d’une ressortissante de Côted’Ivoire souffrant d’une infection HIV et devant suivre un traitement antirétroviral.
Le TF considère en fait et en droit:
1. A. X., ressortissante de Côte d'Ivoire, née Z. en 1981, est arrivée en Suisse au mois de mai 2002 en tant que requérante d’asile. Le 13 mai 2004, elle a épousé un ressortissant suisse, B.X., né en 1950, dont elle a partagé le domicile, à Lausanne, jusqu’à la séparation du couple, autorisée par mesures protectrices de l’union conjugale du 3 août 2004. Les époux ont toutefois maintenu des contacts réguliers. Lui-même assisté, le mari n’a pas été astreint à verser une pension alimentaire à sa femme. Par décision du 2 décembre 2004, le Service de la population a refusé l’octroi d’une autorisation de séjour par regroupement familial à A.X. Après enquête, il est revenu sur cette décision et a délivré l’autorisation de séjour sollicitée, le 1er mars 2005. Par décision du 14 juillet 2006, le Service de la population a toutefois refusé de prolonger l’autorisation de séjour de A.X., au motif que son mariage était vidé de sa substance et invoqué abusivement. Saisi d’un recours contre cette décision, le Tribunal administratif l’a rejeté, par arrêt du 16 novembre 2006.
2. Agissant par la voie du recours de droit administratif, A.X. conclut, avec suite de frais et dépens, à l’annulation de l’arrêt du Tribunal administratif du 16 novembre 2006 et à l’octroi d’une autorisation de séjour, subsidiairement au renvoi de la cause aux autorités intimées pour nouvelle décision dans le sens des considérants. (…) Le 26 février 2007, la recourante a sollicité une deuxième prolongation du délai pour verser l’avance de frais requise, subsidiairement l’octroi de l’assistance judiciaire. Elle a produit plusieurs pièces à l’appui de sa demande, ainsi qu’un certificat médical du CHUV du 2 février 2007 indiquant qu’elle était connue pour une maladie HIV depuis le 28 décembre 2006 et qu’un traitement antirétroviral allait débuter le 23 février 2007 et devra être poursuivi à vie.
3.1 (…)
3.2 De nationalité ivoirienne, encore mariée à un ressortissant suisse, la recourante peut se prévaloir de l’art. 7 LSEE (RS 142.20) pour obtenir une autorisation de séjour. Son recours est dès lors recevable à ce titre comme recours de droit administratif, en vertu de l’art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ.
3.3 Lorsque le recours de droit administratif est dirigé contre la décision d’une autorité judiciaire, le TF est lié par les faits constatés dans cette décision, sauf s’ils sont manifestement inexacts ou incomplets, ou s’ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 105 al. 2 OJ). La possibilité de faire valoir des faits nouveaux ou de nouveaux moyens de preuve est alors très restreinte (ATF 130 II 149 consid. 1.2 p. 154; 128 II 145 consid. 1.2.1 p. 150; 125 II 217 consid. 3a p. 22). En particulier, les modifications ultérieures de l’état de fait ne peuvent normalement pas être prises en considération, car on ne saurait reprocher à une autorité d’avoir mal constaté les faits, au sens de l’art. 105 al. 2 OJ, lorsque ceux-ci ont changé après sa décision (ATF 125 II 217 consid. 3a p. 221). Il n’y a donc pas lieu en l’espèce de tenir compte du certificat médical du 2 février 2007 produit par la recourante, attestant qu’elle devait suivre une thérapie anti-HIV à partir du 23 février 2007. De toute façon, le présent recours n’est pas recevable, en tant qu’il concerne l’examen de l’autorisation de séjour de la recourante sous l’angle de l’art. 4 LSEE. En effet, si l’autorité cantonale peut, dans certaines circonstances, accorder ou prolonger une autorisation de séjour du conjoint étranger, même après dissolution de son mariage, elle statue selon le libre pouvoir d’appréciation dont elle dispose, ce qui exclut la compétence du TF (art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ; ATF 128 II 145 consid. 3.5 p. 155).
3.4 Le conjoint étranger d’un ressortissant suisse n’a pas droit à l’octroi et à la prolongation de l’autorisation de séjour ou d’établissement, lorsque, nonobstant un séjour régulier et ininterrompu de cinq ans, le mariage a été contracté dans le but d’éluder les dispositions sur le séjour et l’établissement des étrangers (mariage fictif) ou lorsque le conjoint étranger s’en prévaut à des fins abusives (cf. art. 7 LSEE; ATF 130 II 113 consid. 4.2 p. 117; 128 II 145 consid. 2 et 3 p. 151/152; 127 II 49 consid. 5 p. 56 ss). Ainsi, il y a abus de droit lorsque le conjoint étranger se réfère, dans le seul but d’obtenir une prolongation de son autorisation de séjour en Suisse, à un mariage qui n’existe plus que formellement, soit lorsque l’union conjugale est définitivement rompue et qu’il n’y a plus aucun espoir de réconciliation. A cet égard, les causes et les motifs de la rupture ne sont pas déterminants (ATF 130 II 113 consid. 4.2 p. 117 et les arrêts cités).
3.5 En l’espèce, la recourante se prévaut vainement des quelques liens qu’elle a maintenus avec son mari depuis leur séparation au mois d’août 2004, soit trois mois seulement après leur mariage. Il est en effet constant que les époux n’ont pas l’intention de reprendre la vie commune qui n’a plus aucune substance. Tous deux assistés, rien ne permet en outre de penser que si leur situation financière s’améliorait, ils seraient en mesure de créer à nouveau une véritable union conjugale. Pour le reste, le TF peut se rallier aux motifs de l’arrêt attaqué (art. 36a al. 3 OJ) et confirmer que la recourante se prévaut abusivement de son mariage pour obtenir une autorisation de séjour.
4. Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable, selon la procédure simplifiée de l’art. 36a OJ. Les conclusions du recours paraissant ainsi d’emblée dépourvues de chances de succès (art. 152 al. 1 OJ), la demande d’assistance judiciaire doit être rejetée (…)
(Arrêt du Tribunal fédéral du 26 avril 2007 dans la cause 2A.769/2006)